Apports de l'Atelier National Xynthia, Charente Maritime

De WikiRésilience

Contexte

En 2012, le Commissariat Général au développement Durable du Ministère de l'Ecologie, du Développement Durable et de l'Energie a lancé un grand projet autour de 5 chantiers et de 24 actions de propective et d'innovation. L'action « Analyse intégrée de la Résilience des Territoires » (AIRT) du chantier « Territoires Robustes» vise à construire un cadre d'action pour améliorer la résilience des territoires face aux risques naturels et technologiques, c'est à dire en vue d'augmenter les capacités du territoire et de ses acteurs à résister aux conséquences d'une agression ou d'une catastrophe majeure, puis rétablir rapidement leur capacité de fonctionnement normal ou socialement acceptable.

L'action AIRT s'appuie sur des enquêtes territoriales et des retours d'expérience sur des sites touchés ou potentiellement exposés à des risques pour identifier des mesures et actions généralisables à l'ensemble des territoires.

Le présent rapport porte sur les apports et limites pour la résilience du territoire de la démarche « Atelier national de Charente-Maritime » pilotée par direction Générale de l'Urbanisme, de l'Aménagement, du Logement et de la Nature qui a été menée entre juin 2010 et février 2011.

Présentation du territoire

Le territoire pris en considération dans l'Atelier Xynthia de Charente-Maritime comprend 26 communes, sur une longueur de côte d'environ 80 km et une profondeur moyenne de 15 km. Il s'étend de la Sèvre Niortaise au nord (limite avec le département de la Vendée) jusqu’aux communes situées immédiatement au sud de l’estuaire du fleuve La Charente. Il s'agit de communes directement concernées par la tempête ou de communes plus en retrait du littoral mais en interaction avec lui par le fonctionnement hydromorphologique (bassins versants, marais).

Ce territoire s'appuie sur un bipôle constitué des deux communes principales de La Rochelle au nord et Rochefort sur mer au sud, reliées par deux infrastructures importantes, l'une routière (RD137), l'autre ferroviaire (ligne Nantes-Bordeaux).

L’économie du territoire repose à la fois sur des activités primaires traditionnelles (agriculture et conchyliculture), le tourisme et les autres activités industrielles et commerciales étant situées dans les deux agglomérations de La Rochelle et Rochefort.

La vocation touristique du territoire est plus marquée le long du littoral tout en laissant encore une place importante aux espaces naturels avec des enjeux forts de bio-diversité et une forte présence des activités liées à la mer. Le territoire couvert par l'Atelier est essentiellement continental à l'exception de l’Île d'Aix qui dépend de la communauté d'agglomération de Rochefort.

La géographie se caractérise par la présence des marais témoins de la présence ancienne de la mer (notamment le Golfe des Pictons au nord). Le marais principal s'étend des limites sud de l'agglomération de la Rochelle à Rochefort. Les bourgs traditionnellement installés sur les « terres hautes » se sont parfois étendus dans des zones plus basses dont certaines étaient autrefois occupées par des activités traditionnelles du littoral et ont muté progressivement en zones résidentielles.

Trois SCOT(s) approuvés existaient ou étaient en cours d'élaboration au moment de la tempête Xynthia. L'élaboration de ces documents avaient été l'occasion de partager avec les collectivités la déclinaison des politiques publiques en matière d'aménagement (loi littoral, réduction de la consommation d'espace).

Sur la partie sud du territoire, un Plan de Prévention des Risques Littoraux (PPRL) dit « Estuaire Charente » était en cours d'élaboration avec une contestation des acteurs locaux sur le niveau d'aléa retenu. Sur le territoire de l'agglomération de La Rochelle jusqu'au nord du département, les études préalables à un PPRL avaient été engagées juste avant l’événement Xynthia.

Le territoire considéré, Tempête Xynthia.bmp

  Le territoire considéré, Atelier National Xynthia 


Présentation de l’événement

La tempête Xynthia a touché les côtes atlantiques françaises dans la nuit du 27 au 28 février, au maximum de son creusement (centre dépressionnaire à 969 hPa), avant de poursuivre sa route vers le nord de la France. La zone de formation (en plein coeur de l’Atlantique, près du tropique du cancer) et la trajectoire de Xynthia sont atypiques. Du point de vue météorologique, la tempête Xynthia, de taille et d’intensité peu communes, n’a pas atteint pour autant le caractère exceptionnel des tempêtes Lothar et Martin de décembre 1999, ni celui de Klaus de janvier 2009 :

  • les rafales maximales relevées en plaine, de 160km/h sur le littoral et de 120km/h à 130 km/h dans l’intérieur des terres, sont inférieures à celles enregistrées lors des événements de 1999 et de 2009 où l’on relevait près de 200 km/h sur le littoral et 150 à 160 km/h dans l’intérieur des terres,
  • Xynthia ne peut être qualifiée de « tempête explosive » car son creusement (une diminution de 20 hPa en plus de 24 h) étant « classique » pour une dépression hivernale,
  • la tempête a traversé le pays assez rapidement ; sa durée d’action a donc été moindre. Si Xynthia n’a pas atteint l’intensité des tempêtes de décembre 1999, en termes de vitesses maximales instantanées de vent, elle est singulière par l'intensité des phénomènes de submersion et d’érosion.

Le passage de la tempête a, en effet, coïncidé avec la pleine mer d’une marée de vives-eaux de coefficient 102 (pour un maximum de 120 pour les plus hautes marées) et des fortes houles comprises entre 6 et 7 m au large, provoquant une surcote de l’ordre de 1,50 m à La Rochelle. Les mécanismes à l’origine de la submersion marine sont aujourd’hui connus et ont pour origine un important système dépressionnaire qui s’accompagne d’une élévation du niveau marin, selon trois processus principaux :

  • la chute de pression atmosphérique,
  • l’effet du vent à la surface de l’eau générant une modification du plan d’eau (surcote ou décote) et des courants,
  • le déferlement des vagues sur la côte selon la morphologie du littoral (surcote liée aux vagues ou “wave setup”).

Le niveau maximal atteint par la mer (" Run-up") tient compte également du jet de rive ("swash"), c’est-à-dire le flux et le reflux des vagues. La conjugaison de ces différents phénomènes provoque des submersions marines. L’action de la houle contribue par ailleurs à l’érosion du trait de côte, par arrachement de matériaux sableux, notamment aux plages et aux cordons dunaires. Environ 80 communes ont été touchées en Charente-Maritime par la tempête Xynthia avec des impacts humains et matériels très importants : douze personnes ont perdu la vie, des centaines de familles ont dû être relogées, plus de 100 km de défenses contre la mer détériorés ou détruits, 5 000 à 6 000 bâtiments ont été submergés.