Réinventer une relation privilégiée entre les porteurs de projets et les pouvoirs publics

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Contexte

Cette fiche entre dans le cadre de l'analyse collaborative des difficultés rencontrées et des pistes d'action proposées par les porteurs de projets.

Un appui effectif des collectivités locales et de certains services déconcentrés de l’État

Les éléments que nous développons dans ce point sont en partie repris de l’atelier sur les liens avec les collectivités territoriales de la journée d’échanges du 17 juin. La question de départ était : « Quels liens observez-vous entre collectivités territoriales et porteurs de projets de votre territoire ? (quelles collectivités, quelle nature de lien, quel appui à votre projet, quand ?) ».

Des collectivités qui apportent un appui politique, technique et financier aux projets...

De la commune à la région, tous les niveaux de collectivités ainsi que leurs groupements sont concernés. Pour l’ensemble des participants à la journée, le rôle des élus qui peuvent faire bénéficier les porteurs de projet de leurs réseaux est un atout pour communiquer, démarcher et renforcer la visibilité des initiatives.

Les élus municipaux et communautaires comme initiateurs de lien et de soutien politique...

  • « La Communauté de Communes s’est associée au projet et cela a permis de bénéficier du soutien des élus. Dans un second temps, le maire-adjoint à l’Économie a fait faire un diagnostic territorial de la Communauté de Communes (par des étudiants en master de l’ISARA1) qui montre 3 potentiels : le bois, la pierre et la laine. Cela nous a permis de mobiliser le préfet et d’obtenir un soutien politique. Notre député va rencontrer le cabinet d’Arnaud Montebourg2 pour que ce projet devienne un PTCE (Pôle Territorial de Coopération Économique) ». Pascal LAFONT – Directeur des Ateliers de la Bruyère – Pôle Laine du Pays de Saugues
  • « On a rencontré des hommes politiques qui nous ont dit qu’on pouvait faire un test sur l’espace public. L’initiative a pris de l’ampleur et nous sommes allés au club développement durable des élus de Clermont-Ferrand. On y a rencontré le directeur des espaces publics de la ville qui nous a octroyé un bout de terrain sur lequel nous avons planté ». Cyril LE FUR – Incroyables Comestibles de Clermont-Ferrand
  • « Aujourd'hui, grâce au PTCE, la collectivité est partenaire et elle s'occupe des dossiers de subvention. » Emmanuelle DUBREUCQ – Archer Made in Romans

… Relayés par un appui technique et financier de niveau régional

  • « Ce projet de pôle laine a trouvé une première concrétisation grâce à un appel à projet de recherche-action de la Région Auvergne sur l’innovation sociale. Cela a permis de financer le travail des chercheurs du CEREMAC à hauteur de 30 000 euros ainsi que l’obtention d’un financement du PLIE (Plan Local pour l’Insertion par l’Emploi)». Pascal LAFONT – Directeur des Ateliers de la Bruyère – Pôle Laine du Pays de Saugues
  • « Par le biais d’une convention de mise à disposition avec la commune, nous avons pu avoir des locaux et commencer la recherche de financements auprès de la Région, du Conseil Général et de l’État. »

Pascal LAFONT – Directeur des Ateliers de la Bruyère – Pôle Laine du Pays de Saugues

  • « Nous avons bénéficié d’un soutien financier de l’AFDPAB (Agence Française pour le Développement et la Promotion de l’Agriculture Biologique) qui appuie les projets innovants. Nous avons aussi reçu l’appui [financier] du Conseil Régional de Rhône-Alpes via la Direction de l’Agriculture et du Développement Rural ». Marie BOURBON – Co-fondatrice de l’association Malteurs Echos

...Tout en présentant un décalage entre leurs compétences et la réalité des projets

  • « Les collectivités fonctionnent au regard des compétences attribuées qui ne correspondent pas à la réalité des projets »

Expression d'un porteur de projet

Une intervention privilégiée des porteurs de projets avec les services déconcentrés de l’État en charge de l'emploi et de la cohésion sociale

Les services déconcentrés du Ministère de l’Économie, du Redressement Productif et du Numérique (MERPN) ainsi que ceux du Ministère des Affaires Sociales et de la Santé sont les principaux acteurs de l’État, cités comme apportant un appui aux porteurs de projet. Une intervention de la DIRECCTE par le biais de l'évaluation des structures de l'insertion La DIRECCTE (Direction Régionale des Entreprises, de la Concurrence, de la Consommation, du Travail et de l’Emploi), en tant que service déconcentré du MERPN est le principal interlocuteur des structures d’insertion, grâce à l’appui technique et financier qu’elle apporte. A ce titre, elle est conduite à évaluer l’action des structures qu’elle finance.

  • « Je peux comprendre que [l’évaluation] ne plaise pas à tous mais nous faisons preuve de pédagogie et d’accompagnement et après tout, nous donnons des subventions donc nous ne sommes pas là pour plaire. Les structures peuvent vivre l’évaluation comme une contrainte mais cela dépend de la personnalité de chacun et de la nature de la structure. Avant, nous étions très directifs mais avec les années, nous nous améliorons, nous nous formons et nous fixons des objectifs plus pertinents et réalistes, nous évoluons en compétences. C’est un exercice qui se passe de mieux en mieux. » Sabrina KEMPF – Gestionnaire à la DIRECCTE Centre – Unité Territoriale du Cher
  • « C’est normal, que l’État nous contrôle puisqu’on nous donne de l’argent public » Jacques NODIN – Président de Envie Dijon
  • « Nous sommes aussi évalués par la DIRECCTE qui est bien plus pertinente et efficace dans sa façon de faire. C’est une véritable intelligence car ils ont su faire évoluer leurs outils et se remettre en question donc leurs indicateurs tiennent bien plus compte de la réalité. » Jean-Luc BIRSKI – Directeur de la Régie de Quartier de Vierzon

Les services déconcentrés du Ministère des Affaires Sociales, la DDCS (Direction Départementale de la Cohésion Sociale) et la DRJSCS (Direction Régionale de la Jeunesse des Sports et de la Cohésion Sociale) apportent également leur aide à certaines associations via le FONJEP (Fonds de Coopération de la Jeunesse et de l’Éducation Populaire).

Dans le cas du Mat Drôme, ce sont les acteurs de la Politique de la Ville comme l’ANRU (Agence Nationale de la Rénovation Urbaine) et l’ACSé (Agence Nationale pour la Cohésion Sociale et l’Égalité des Chances) qui peuvent apporter des ressources financières.

Une intervention plus ponctuelle des services déconcentrés des Ministères en charge de l’Écologie et de l’Égalité des Territoires.

  • « La Direction Départementale des Territoires de Haute-Loire est venue nous voir pour utiliser la laine pour l’isolation des bâtiments, dans le cadre d’une action financée via le CPER (Contrat de Projet État-Région) » Pascal LAFONT – Directeur des Ateliers de la Bruyère – Pôle Laine du Pays de Saugues

Trois attentes principales exprimées à l'endroit des pouvoirs publics

Les attentes ont été abordées afin que les pouvoirs publics disposent d’éléments sur lesquels s’appuyer pour favoriser l’émergence des projets résilients et renforcer le partenariat avec les porteurs de ces projets. Trois principales attentes ont été formulées à partir de la question suivante : « Quelles attentes identifiez-vous de l’un vers l’autre et au nom de quoi ? (Avec qui, quelle nature de lien, pour faire quoi, quand, comment ?) »

Utiliser le pouvoir d'invitation de la puissance publique

Pour certains porteurs de projet, le rôle des pouvoirs publics (Etat et collectivités locales) est de créer une dynamique de projet en conviant autour de la table tous les acteurs potentiels du projet.

  • « Il y a besoin d’un leader qui ait ce pouvoir d’invitation des autres structures car nous avons clairement besoin d’identifier les acteurs. L’État n’a plus cette compétence et c’est maintenant la région et les intercommunalités qui s’en chargent mais la région est parfois trop éloignée du territoire […].

Dans notre cas, le Préfet de Région a demandé au SGAR (Secrétariat Général des Affaires Régionales) de réunir l’ensemble des partenaires pouvant contribuer à notre projet (La Cité de l’Autre Économie à Dijon). Cela nous a clairement facilité la tâche ». Jacques NODIN – Président de Envie Dijon

  • « Il faudrait identifier un acteur de l'Etat qui s'occupe de tous les partenariats du projet. Si on ne fait pas ça, l’État sera absent de la stratégie de développement du territoire. » Expression d’un porteur de projet durant le débat sur les financements

D’autres imaginent une complémentarité collectivités territoriales–CRESS où le premier détiendrait le pouvoir d’invitation et le second jouerait le rôle de médiateur.

  • « C’est aussi à nous CRESS de faire de la médiation avec les collectivités car pour l’instant, on intervient en dernier recours […] Plutôt que de parler de médiation, utilisons plutôt le pouvoir d’invitation de la collectivité, ce qui permet de rassembler de nombreux et différents acteurs. C’est à la CRESS de faire la médiation et dire ce qu’il faut faire ou pas. ». Julie ANDRE – Responsable de Projets – CRESS Rhône-Alpes

Les syndicats mixtes peuvent jouer ce rôle et impulser une dynamique sur les territoires.

  • « Le Syndicat mixte [des Monts de la Madeleine] a monté un petit réseau d’agriculteurs depuis 2008. Il compte environ 30 personnes dont 8 agriculteurs, des paysans-boulangers, une savonnerie, … : ensemble ils ont travaillé à la production de divers produits à partir des graines (huile alimentaire, savons, cosmétique, ...) qui représentent de nouveaux produits touristiques pour les maisons de pays. La paille est, quant à elle, valorisée comme éco matériau pour la construction. » Ludivine DAMIAN FARJOT – Chargée de Mission Tourisme – Syndicat Mixte des Monts de la Madeleine

Clarifier le rôle des acteurs et leurs compétences...

… En permettant la mise à disposition de compétences pour les porteurs de projets

  • « Il faudrait une personne qui soit mise à disposition des porteurs de projet et qui soit formée ou qui ait suffisamment de visibilité sur les compétences de chacun et l’ensemble des ressources humaines et financières disponibles sur un territoire. Aujourd’hui, de l’ingénierie existe sur les territoires mais comment la repérer, la rendre cohérente, la faire évoluer ? » Pascal LAFONT – Directeur des Ateliers de la Bruyère – Pôle Laine du Pays de Saugues

Légitimer le partenariat avec les pouvoirs publics à travers la finalité d'intérêt général des projets

Une des demandes des porteurs de projet est que l’intérêt général soit pris en compte comme critère d'attribution de subvention en vue d’un partenariat plus large avec les pouvoirs publics. Ces derniers agissant dans l’optique de l’intérêt général, leurs objectifs rencontrent donc parfois ceux des porteurs de projets qui valorisent les ressources disponibles sur le territoire.

  • « Tous les projets ici travaillent pour l'intérêt général. Or, la puissance publique doit travailler pour l'intérêt général donc c'est bien eux qui devraient accompagner ces projets. ». Pascal LAFONT – Directeur des Ateliers de la Bruyère – Pôle Laine du Pays de Saugues
  • « Ce que je cherche chez l’État, c'est sa vision de l'intérêt général. Est-ce que nos projets rentrent dans le développement territorial et est-ce que ça remplit une fonction d'intérêt général ? ». Jacques NODIN – Président de Envie Dijon

Cinq pistes d'action pour renforcer les liens

Les éléments de ce point sont en partie repris de l’atelier sur les liens avec les collectivités territoriales. La question de départ était : « Comment parvenir à ce lien souhaité ? (conditions du dialogue entre projet innovant et action publique ?) »

Créer un guichet unique

Le caractère protéiforme des projets rend la recherche de financements laborieuse en raison du nombre d’acteurs et des exigences différentes de chacun. La création d’un guichet unique permettrait d’identifier clairement et rapidement les acteurs-ressources selon le territoire et le type de projet puisqu’en fonction de ces deux critères, l’ingénierie disponible peut fortement varier. En outre, cela créerait davantage de transversalité entre les services.

  • « Notre projet intéresse plein de personnes mais certains ne veulent qu’un petit bout et pas l’autre, ce qui pose problème pour obtenir leurs financements. On aurait aimé que la réforme de l’insertion par l’activité économique donne lieu à la création d’un guichet unique mais cela n’a pas été le cas ».

Pascal LAFONT – Directeur des Ateliers de la Bruyère – Pôle Laine du Pays de Saugues

  • « Le projet est protéiforme et donc il est difficile de trouver le financement, car il ne rentre pas globalement dans les cadres des financeurs : chaque financeur peut financer un bout d’une partie du projet, mais il y a très peu de financement pour le pilotage général du projet : un pôle d’excellence rural aurait peut-être permis de trouver ce financement global mais cela n’existe plus. »

Pascal LAFONT – Directeur des Ateliers de la Bruyère – Pôle Laine du Pays de Saugues

  • « On rentre dans plusieurs cases et du coup ça multiplie les interlocuteurs. Ce qui a du sens pour nous, c'est d'être tout à la fois et que ça ça soit valorisé. »

Fanny VIRY – Coordinatrice de la recherche et de la formation – ANCIELA

Favoriser les temps de rencontres entre les porteurs de projets et les pouvoirs publics

  • « Créer les conditions du dialogue en amont du montage des projets, avec les élus (sénateur-maire par exemple) et favoriser le débat sur l'acceptation politique du dossier. »

Expression d'un acteur relais lors des interviews bilatérales

  • « La dimension financière et l’accessibilité des collectivités locales peut être une source de blocage pour ceux qui ne connaissent pas le fonctionnement des instances. »

Meriem FRADJ – Présidente de l’association Le Mat Drôme

Communiquer autour des projets

  • « Réussir des actions concrètes et communiquer dessus pour agglomérer les acteurs au fur et à mesure. »

Expression d'un porteur de projet lors des interviews bilatérales

  • « Susciter une vision dynamique du projet. Le vendre comme une action positive du développement local, comme une valorisation d'une ressource locale. »

Expression d'un acteur lors des interviews bilatérales

Rassurer les élus en sensibilisant à la mobilisation par l'exemple

  • « Mobiliser peut faire peur. Il faut davantage rassurer les élus sur ce point. Il faut jouer sur la valeur d'exemplarité de certains projets sur d'autres territoires, sensibiliser les élus par l'exemple. » Expression d'un acteur lors des interviews bilatérales

Décloisonner les services des collectivités

  • « Décloisonner les services des collectivités et créer de la porosité entre les cases » Fanny VIRY – Coordinatrice de la recherche et de la formation – Association ANCIELA
  • « Réussir à pousser les portes et laisser le pied dedans » Expression d'un acteur lors des interviewes bilatérales



Fiche résumé réalisée par Adeline Bordais (CGDD-DRI) sous l’initiative et la relecture de Jean-Michel Tanguy (CGDD-DRI) et Geneviève Besse(CGDD) ; à partir des travaux de la version complète "Société résiliente et cohésion sociale". Décembre 2014.