Villes résilientes - Étude de cas "Province de Limbourg" : Différence entre versions

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Fiche résumé réalisée par Adeline Bordais (CGDD-DRI) sous l’initiative et la relecture de Jean-Michel Tanguy (CGDD-DRI) et Anne Charreyron-Perchet (CGDD) ; à partir des travaux de la [http://wikhydro.developpement-durable.gouv.fr/images/1/1f/Etude_Villes_R%C3%A9silientes_-_Lucile_Dufour_2014.pdf version complète de Lucile Dufour] (CGDD). 13/10/2014.
 
Fiche résumé réalisée par Adeline Bordais (CGDD-DRI) sous l’initiative et la relecture de Jean-Michel Tanguy (CGDD-DRI) et Anne Charreyron-Perchet (CGDD) ; à partir des travaux de la [http://wikhydro.developpement-durable.gouv.fr/images/1/1f/Etude_Villes_R%C3%A9silientes_-_Lucile_Dufour_2014.pdf version complète de Lucile Dufour] (CGDD). 13/10/2014.
  
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Version actuelle en date du 15 octobre 2014 à 14:56

La province de Limbourg aux Pays-Bas, une stratégie de résilience à plusieurs échelles


Limbourg, un territoire caractéristique des régions européennes en déprise

Situation géographique

Situation géographique.bmp

  Situation de la province de Limbourg 
  Source : OCDE LEED
  • Un contexte national globalement favorable

La région de Limbourg est l’une des 12 provinces des Pays-Bas. Membre fondateur de l’Union Européenne, les Pays-Bas profitent d’une situation économique très favorable. Ils sont en effet situés dans une des régions les plus dynamiques d’Europe et font figure d’un des États les plus riches de la zone, avec un PIB/habitant de 30% supérieur à la moyenne européenne. De même, le taux de chômage reste structurellement très bas depuis une dizaine d’années (autour de 5%). Cependant, comme la plupart des pays européens, les Pays-Bas devraient être confrontés dans les prochaines années à un ralentissement de la croissance démographique, et à des situations de déprise de plus en plus fortes notamment dans les villes. Si la population néerlandaise devrait ainsi croître jusqu’en 2040, son taux de croissance est en déclin depuis les années 1960, et se situe désormais autour de 4%. Cette situation, si elle est caractéristique de nombreux pays développés, est susceptible d’avoir des conséquences importantes sur le tissu économique et social et l’organisation spatiale du pays : c’est tout particulièrement vrai dans le cas de la province de Limbourg.

  • Une région frontalière enclavée

La province de Limbourg est la région la plus au Sud des Pays-Bas. Elle se compose de trois régions administratives (Nord Limbourg, Mid-Limbourg et Sud Limbourg) et est polarisée autour de quatre aires urbaines principales, majoritairement situées dans le Sud Limbourg (Maastricht avec 117 000 habitants, SittardGeleen avec 96 000 habitants, Heerlen avec 90 000 habitants dans le Sud Limbourg et Venlo avec 100 000 habitants dans le Nord Limbourg). Située à l'extrémité Sud du pays, et relativement éloignée des centres de décision importants, la province est surtout en partie enclavée entre l'Allemagne et la Belgique. Cette localisation crée une situation de concurrence forte entre les villes de la province et les villes frontalières des deux autres pays : l'axe Rhin-Ruhr notamment, avec les villes de Duisbourg, Düsseldorf et Cologne se situe à moins de 100km à l'Ouest de la province. Cette proximité a entraîné au cours des dernières années la création d’importants flux migratoires extérieurs, et des migrations pendulaires de plus en plus fréquentes. Les activités économiques et les capitaux sont également attirés vers l’étranger et ses territoires plus dynamiques. Toutefois, cette situation transfrontalière pourrait également constituer un atout territorial pour l'avenir de la province. Elle pourrait valoriser sa situation géographique en créant des synergies avec les villes alentour et en se positionnant comme carrefour des échanges au cœur de la région.

Pas de choc brutal mais une dégradation lente des structures économiques et démographiques

Depuis une dizaine d'années, le territoire connaît une dégradation lente mais significative de ses structures démographiques et économiques. Cette tendance négative handicape le développement de la région.

  • Des tendances démographiques négatives

Contrairement à la dynamique nationale, la population de Limbourg est en constante réduction depuis une dizaine d’années. Elle est passée de 1,14 millions en 2002 à 1,12 millions en 2011, soit une baisse de près de 2% en moins de 10 ans. Cette diminution est due à la fois à un ralentissement de la croissance naturelle, négative depuis 2005, et à l'attraction des régions frontalières de la province, plus dynamiques, qui entraînent une fuite de la population active à l'étranger. Le solde migratoire a d'ailleurs constamment diminué depuis les années 1990, et les flux migratoires externes ont dépassé les flux internes à partir des années 2000.

La densité de population de la province (522 habitants par km²), forte par rapport à la moyenne nationale, a permis jusqu’à présent de limiter les effets du déclin démographique. Cependant, les conséquences pourraient être plus importantes sur le long terme. La tendance négative devrait se confirmer dans les prochaines décennies. Aussi, un vieillissement significatif et régulier de la population est visible dans la province : la part de la population âgée de plus de 65 ans représente en 2012 19.2% de la population. Depuis les années 1970, la part de la population âgée a ainsi été multipliée par 2.5.

  • Une dégradation progressive du marché de l'emploi et de l’attractivité économique

L'atonie démographique a contribué à la dégradation progressive du dynamisme économique de la province. Depuis le milieu des années 90, elle a du faire face à un déclin relatif de son activité par rapport aux autres provinces néerlandaises. Alors qu’elle contribuait à hauteur de 6.4% à la création de richesse nationale, la province ne représente aujourd'hui plus que 5.9% du PIB des Pays-Bas. Si cette diminution peut largement être corrélée au déclin démographique, les autres grands indicateurs économiques attestent de la fragilité du territoire : le PIB/habitant est bien inférieur au reste du pays (13% en dessous du PIB/hab moyen en 2009) et le taux de chômage, s'il reste structurellement bas, est supérieur aux taux nationaux (4.8% en 2011 contre 4.5% au niveau national).

C’est la structure des activités économiques de Limbourg qui explique majoritairement ce déclin. En effet, la province a traditionnellement été orientée vers des activités industrielles et agricoles, qui représentent encore aujourd'hui une part relativement importante des emplois : 19.1% de la population est employée dans le secteur secondaire, contre 15% au niveau national. Cette structure met en difficulté la province, qui doit faire face d’une part à une désindustrialisation progressive et d’autre part à une inadéquation croissante entre les qualifications de la population active et de l’offre d’emploi. La population reste en effet encore trop peu qualifiée, en particulier dans le Sud Limbourg.

  • Des disparités régionales fortes

Si la situation de Limbourg laisse entrevoir des fragilités structurelles et un déclin encore peu alarmant de l’activité économique, le territoire est surtout marqué par de très fortes disparités qui accentuent ses vulnérabilités. Les régions de Nord Limbourg et de Mid-Limbourg affichent un certain dynamisme économique et démographique. En revanche, la situation de la région de Sud Limbourg est bien moins favorable. C'est dans cette région que les changements démographiques et économiques sont les plus forts (taux de chômage plus élevé, baisse de la population plus importante), et où les conséquences en sont déjà les plus visibles. Les contrastes sub-régionaux sont encore plus significatifs. Dans le sud Limbourg, la ville de Maastricht, très dynamique, lisse les chiffres au niveau régional alors que d'autres municipalités sont extrêmement touchées par le déclin.

Conséquences : une situation caractéristique des shrinking cities

Les mutations démographiques et économiques auxquelles est confrontée la province de Limbourg la rendent surtout vulnérable sur le long terme. En effet, le territoire risque de devoir faire face à des problématiques socio-économiques caractéristiques des zones de déprise, et à un renforcement de la dynamique de déclin au fil du temps. Les villes les plus touchées par la baisse de la population doivent d'ores et déjà gérer des problématiques de logements, de fermetures de services publics et de baisse des revenus financiers. C'est le cas notamment de la communauté de commune de Parkstad Limbourg, regroupant 8 municipalités, et qui prévoit déjà la réduction importante du nombre de logement (11000 unités devraient être amenées à être détruites dans les prochaines années). La région court également le risque d'une polarisation de plus en plus forte de son territoire autour de la ville de Maastricht, seul grand moteur économique de la province, par rapport aux aires urbaines de moyenne et petite tailles.


La province de Limbourg apparaît comme une région caractéristique des phénomènes de déprise dans les pays européens. Si sa situation ne paraît pas alarmante au regard de la situation nationale, c'est surtout sur le temps long que l'évolution des structures économiques et démographiques pourraient porter préjudice au développement de la région. D'autre part, l'existence de grandes disparités régionales et de zones en grandes difficultés dans le Sud Limbourg rendent la mise en place de politiques de redynamisation nécessaires en particulier dans les municipalités en difficultés. La province peut d'ailleurs exploiter des ressources territoriales non négligeables, comme sa situation transfrontalière et un environnement favorable. C'est à partir du milieu des années 2000 que des politiques vont être élaborées dans la province. Elles ont la particularité de reposer sur une stratégie transversale et intégrée, à plusieurs échelles, et prenant en compte le long terme.

Une stratégie de résilience provinciale

Une stratégie conçue à plusieurs échelles

Le milieu des années 2000 a été marqué par la mise en place d'un plan de redynamisation conçu à plusieurs échelles. Il a donné lieu à une étude approfondie des atouts et des faiblesses du territoire de Limbourg, et a permis d'élaborer une politique cohérente, intégrée à des logiques locales, régionales et nationales.

  • L’échelle provinciale comme cœur de la stratégie

La stratégie s’est en premier lieu développée au niveau provincial, grâce à la proactivité du gouvernement de Limbourg. Une prise de conscience des vulnérabilités démographiques a eu lieu à la fin des années 2000 et a incité les autorités provinciales à créer un Comité consultatif sur la déprise démographique en 2011. Ce comité, commandité par la province et constitué de 3 experts, a été chargé d'analyser pendant un an la situation du territoire en réalisant de nombreux entretiens avec les acteurs politiques régionaux et locaux, les acteurs économiques, sociaux, les fédérations de logements, et les centres d'enseignement et de recherche.

Le comité a identifié 4 domaines clés de développement pour la province, qui doivent être encouragés en priorité dans le Sud Limbourg, la région la plus fragile :

1) Miser sur la redynamisation de l’économie, en favorisant la création de synergies dans le tissu économique, et en orientant les nouveaux développements vers l'innovation et les initiatives vertes.

2) Développer l'enseignement et la recherche. La province doit en particulier développer l'enseignement supérieur, et encourager la mise en place de partenariats entre universités, centres de recherches et entreprises.

3) Aider à la restructuration du marché des logements en contribuant à son rééquilibrage autour des trois villes principales du Sud Limbourg (Maastricht, SittardGeleen et Heerlen).

4) Améliorer la qualité du secteur de la santé, en vue du vieillissement de la population dans les prochaines années.

  • Un soutien au niveau régional et national

En outre, la province s’est appuyée pour la mise en place de son plan de redynamisation sur les fondements de stratégies déjà initiées aux niveaux régional et national. La politique mise en place à Limburg s'intègre en effet largement dans la politique nationale de top secteurs, qui vise à identifier des aires clefs de développement pour la région. Dans le cas de Limbourg, les secteurs ont été différenciés selon les 3 régions de la province. Le Nord et Sud Limbourg doivent se spécialiser dans les domaines de l'agroalimentaire, de la logistique et des matériaux hightech. Le Sud Limbourg doit quant à lui porter son développement sur les secteurs de la chimie, des sciences naturelles et de l'énergie. Ces préconisations rejoignent et renforcent les conclusions du comité sur la déprise démographique.

Le programme de Brainport 2020, élaboré au niveau régional, a aussi servi de soutien majeur aux politiques menées dans Limbourg. Brainport 2020, qui vise à faire du Sud-Est des Pays-Bas une des zones leader dans le secteur de la recherche et de la connaissance à l'horizon 2020, a permis la création de centres de recherche autour de la ville d'Eindhoven. Dans la province de Limbourg, il a notamment contribué au développement des campus de Chemelot, Maastricht et Venlo.

Les politiques de Limbourg s’intègrent ainsi dans des stratégies élaborées à plusieurs niveaux de décision. Ce jeu d’échelles et la démarche réflexive mise en place au niveau provincial ont permis de créer des politiques opérationnelles et surtout adaptées aux contextes provinciaux et locaux.

Une vision globale et une stratégie transversale

  • Une approche transversale

Le croisement des échelles de décision et la distanciation par rapport à la situation du territoire ont finalement permis de créer une stratégie englobante et transversale, qui vise à résoudre à la fois les problématiques démographiques et économiques du territoire. Les vulnérabilités de la région ne sont ainsi pas considérées comme des problématiques isolées les unes par rapport aux autres, mais bien comme faisant partie d'un système complexe d'interactions et d'interconnexions. L’objectif est ainsi de créer des synergies entre les différents domaines d’intervention et de favoriser l’apparition d’une nouvelle dynamique de développement auto-entretenue dans la région.

Cette approche est en particulier illustrée par le plan "Limburg Economic Development" (LED), regroupant les parties prenantes majeures du territoire (entreprises, centres d'enseignement et de recherche et gouvernements régionaux et locaux). Ce programme vise à agir dans les 4 secteurs clefs identifiés par le comité consultatif pour limiter les effets de la déprise : l'économie, le marché des logements, la santé et l'éducation. La politique transversale engagée témoigne ainsi d'une prise en compte globale des problématiques de déprise et de leur intégration dans un agenda politique complet.

  • Un champ moteur : l'innovation scientifique et écologique

Les secteurs de la recherche et de l’innovation sont présentés comme des éléments moteurs pour le développement de Limbourg. La province veut ainsi devenir une région de pointe dans le secteur de la connaissance et de la R&D, en particulier dans le domaine des sciences et de l’écologie. La création de plusieurs clusters, notamment dans le Sud Limbourg, regroupant des universités, des centres de recherche, des laboratoires et des parcs industriels d’entreprises innovantes ont été caractéristiques de cette démarche.

- L’université de Maastricht constitue la plus grande université de la région et le premier élément de cette stratégie. L’université accueille en effet la plus grande part d’étudiants étrangers de tout les Pays-Bas (près de 40% de ses élèves), et contribue ainsi à la renommée et au rayonnement de la région au niveau européen, en particulier pour les pays frontaliers, la Belgique et l’Allemagne. Le développement de l’Université est ainsi apparu comme une opportunité importante d’attirer des populations jeunes dans la région, et une main d’œuvre qualifiée potentielle (12% des étudiants étrangers s’installent dans la province à la fin de leurs études). Depuis 2000, cette stratégie d’ouverture à l’international a ainsi engendré une augmentation substantielle du nombre d’étudiants étrangers.

- Le campus de Chemelot, situé à Geleen (à 20km au Nord de Maastricht) illustre bien la volonté du territoire de développer son attractivité et de devenir une région pilote dans le domaine de l’innovation. Le campus regroupe des initiatives de recherche et développement dans le secteur des produits chimiques et des matériaux. Le centre de recherche accueille également un parc industriel, dans lequel sont implantées actuellement plus de 100 entreprises. Le site a permis la création de plus de 6000 emplois. De plus, des initiatives de coopérations, comme des laboratoires partagés, sont mises en place avec l’Université de Maastricht et plusieurs centres d’enseignement supérieur de la province. Elles contribuent à créer des synergies entre étudiants, jeunes diplômés et acteurs économiques, et à améliorer l’adéquation entre formations professionnelles et offres d’emploi.

- Greenport Venlo, un modèle d’innovation verte situé dans la région de Nord Limbourg s’inscrit dans le cadre d’un programme national de développement des Greenports (des clusters regroupant des centres de recherche et des entreprises dans les secteurs de l’horticulture et de l’agroalimentaire). Ces clusters visent à encourager les innovations tournées vers le développement durable, le développement d’énergies renouvelables, les systèmes d’économie circulaire et les innovations de logistique, transports et stockage des productions. Greenport Venlo, dont la croissance est assurée depuis 2009 par une fondation du même nom, constitue le cluster le plus abouti des Pays-Bas avec une aire de développement de plus de 20km² et la création de plus de 5000 nouveaux emplois avec une valeur ajoutée de 2 milliards d’euros pour la région. Outre son impact économique important, Greenport Venlo a aussi contribué à créer une zone pilote tournée vers l’innovation verte. Une stratégie de sobriété énergétique a été mise en place pour les entreprises implantées dans la zone. L’utilisation d’énergies propres (énergie solaire, éolienne et biomasse, géothermique) a notamment été encouragée grâce à la création d’un réseau interne d’électricité. De même, une centrale de production d’électricité durable devrait être créée en 2015 pour assurer l’indépendance énergétique de la zone. La géothermie et la biomasse sont également utilisées dans les zones de productions agricoles de Greenport Venlo. Enfin, l’environnement naturel du parc industriel et de recherche est sauvegardé, par la préservation de grands espaces libres de cultures et d’infrastructures, afin de conserver une qualité environnementale forte. Le cluster intègre ainsi une stratégie de développement durable et de développement économique tournée vers l’innovation et la recherche. Cette initiative contribue pleinement à redynamiser la région mais aussi à développer des solutions de production viables et soutenables pour son futur.


Ces trois exemples illustrent bien la stratégie menée sur le territoire : elle vise à faire de la province de Limbourg une région de pointe dans les domaines de la recherche et de l’innovation. Cette stratégie témoigne surtout de la volonté de s’inscrire sur le temps long : la recherche et l’innovation apparaissent en effet comme des investissements importants pour l’avenir de Limbourg, qui veut se différencier des provinces avoisinantes par le développement d’activités soutenables et à forte valeur ajoutée.

La stratégie provinciale a ainsi permis de poser les bases d’une redynamisation économique sur le long terme et a défini des secteurs phares pour améliorer la résilience du territoire. Si cette stratégie a été conçue au niveau provincial et a eu pour vocation de répondre aux problématiques de Limbourg de manière globale, elle s’est prolongée dans plusieurs municipalités au niveau local, avec une réutilisation et une adaptation des modèles évoqués plus haut aux contextes des différentes municipalités. Le cas d’Heerlen, 4ème municipalité de la province, est de ce point de vue représentatif.

Heerlen comme exemple de stratégie de résilience au niveau local

Une municipalité victime des disparités régionales

La municipalité d’Heerlen se situe au Nord Ouest de la région de Sud Limbourg. En 2014, la ville accueille 88 000 habitants, et son aire urbaine atteint une population de plus de 200 000 habitants. Elle constitue une des villes les plus touchées par la situation de déprise économique et démographique dans la province.

Historiquement, le développement de la ville a été marqué par l'industrie minière. A partir du début du XXème siècle, Heerlen a accueilli 4 mines de charbon, et a constitué une des premières régions productrices de charbon des Pays-Bas. L'activité minière a ainsi été un des seuls moteurs du développement économique de la ville. Dans les années 1970, face à la concurrence des mines néerlandaises du Nord mais aussi des productions de charbon polonaises, les 4 mines ont été tour à tour fermées (la dernière, Staatsmijn Emma, en 1973). Ces fermetures ont eu des conséquences de long terme significatives sur les structures économiques (pertes massives d'emploi) et sociales (hausse de l'alcoolisme, de la consommation de drogues) de la ville. Son image s'est également dégradée durant cette période : Heerlen était alors considérée comme une « des villes les moins agréables des Pays-Bas».

En plus de cette perte de dynamisme économique, Heerlen est fortement touchée par un déclin démographique : actuellement, elle se situe parmi les municipalités les plus impactées par la baisse de population (6.2% en 10 ans). Les prévisions sur le long terme devraient confirmer cette tendance : en 2040, la population devrait passer sous la barre des 70000 habitants (soit une perte prévisionnelle de 20% des habitants depuis 2014).

Face à cette situation particulièrement défavorable par rapport au reste de la province, la municipalité a mis en place à partir du milieu des années 2000 des politiques conformes aux grandes orientations de redynamisation de la province (innovation et recherche, économie verte). En outre, ces politiques locales ont eu comme objectif de prendre en compte la vision des populations locales et de modifier l'image de la ville en s'appuyant sur son identité et sur des initiatives culturelles.

L'innovation sociale et l'économie collaborative au cœur de la stratégie

Le coeur de la stratégie d’Heerlen vise à tourner la déprise urbaine en une nouvelle source de développement, grâce à une valorisation de la qualité de vie et à une implication des citoyens dans le processus de réhabilitation urbaine. La situation de déprise doit ainsi être le tremplin à la création d'un environnement favorable à la créativité et à l'innovation, afin de limiter les impacts du déclin et d'adapter l'espace urbain aux mutations structurelles. Dans le cas d’Heerlen, les initiatives d’économie sociale et solidaire, et d’économie collaborative sont apparues comme particulièrement pertinentes pour atteindre ces objectifs. Deux initiatives illustrent particulièrement cette démarche :

  • La création d'une plateforme collaborative de partage de bonnes pratiques et d'innovation

La municipalité d'Heerlen a été à l'origine de la mise en ligne d'une plateforme communautaire ouverte, ZachteG, consacrée à l'économie créative. Cette plateforme permet de rapprocher les initiatives individuelles d'entrepreneurs innovants dans la région d'Heerlen et de donner une visibilité et un écho à leurs projets. Aujourd'hui, plus de 600 entrepreneurs utilisent la plateforme, qui permet de faciliter la communication, de créer des synergies et de nouvelles opportunités pour les acteurs innovants du territoire. La plateforme sert également d'espace d'échanges et de discussions sur les problématiques locales, et a permis dans les dernières années de faire émerger des solutions innovantes aux problématiques de déprise urbaine. L'exemple de la campagne « Design for Emptiness », lancée en 2010 et renouvelée en 2013 en est représentatif. Cette campagne a un double objectif d'intégration d'initiatives innovantes dans le tissu urbain et de revitalisation du centre-ville à travers des méthodes de crowdsourcing. Elle propose aux entrepreneurs de la région de concevoir des solutions créatives de réhabilitation des bâtiments laissés vacants dans le contexte de déprise, le projet gagnant recevant une subvention de 10 000€ pour réaliser son projet. Cette initiative permet la fois de mettre les acteurs du territoire au cœur de son évolution et de créer une dynamique collaborative et innovante pour redynamiser le centre-ville. En 2010, la campagne a donné lieu à la création d'un magasin d'exposition artistique et de mode dans des bâtiments désaffectés. En 2013, l'entrepreneur gagnant a ouvert un studio d'impression 3D dans le centre-ville.

  • Le projet Carbon 6

Cette initiative créée par l'entreprise World of Wallas constitue un espace de coworking et d'innovation dans les anciens bâtiments occupés par l'Institut de Statistiques Néerlandais (CBS). Cette implantation se veut symbolique : à la fin des années 70, l'arrivée de CBS dans les bâtiments avait annoncé un renouveau économique pour la ville, très affectée par la fermeture des mines. Aujourd'hui, Carbon 6 veut donner un nouveau souffle à Heerlen en encourageant les projets innovants et de développement durable. Le centre a ainsi créé un incubateur et un espace de coworking occupé aujourd'hui par une vingtaine de startups, parmi lesquelles on peut trouver des entreprises dans les domaines de l'innovation, de la communication responsable et de l'économie verte (une entreprise d'agriculture urbaine s'est notamment installée dans l'espace). Les locaux sont mis à disposition gratuitement ou à tarif réduits pendant les premières années, pour faciliter le développement et la viabilisation des projets.

La revalorisation de l'identité minière au fondement d'une politique culturelle et de transition énergétique

Un dernier pan de la stratégie d'Heerlen vise à mobiliser les héritages liés au passé minier de la ville, tant de point de vue de l'identité et de la mémoire collective que de la réhabilitation des infrastructures. Depuis 2005, un musée national des mines a été installé dans les anciens bâtiments de la mine Oranje-Nassau I. Il contribue à reconstruire une image positive de l'héritage minier du territoire, et à renforcer l'idée de l'existence d'une identité culturelle commune et d'une histoire riche. De plus, un nouveau projet lancé depuis 2008 vise à réutiliser les aménagements miniers des sous-sols pour la production d'une source d'énergie géothermique. Le projet « mine water » prévoit ainsi l'utilisation des galeries minières, inondées depuis leur fermeture en tant que source d'énergie. Grâce à plusieurs forages construits au dessus des anciennes mines, l’eau des galeries est pompée et sa chaleur emmagasinée dans les sous-sols est valorisée. Cette technologie devrait permettre de chauffer plusieurs bâtiments du centre-ville de manière durable. Un premier bâtiment entièrement chauffé grâce à cette énergie a d’ailleurs été inauguré en 2008 (le centre de l’Énergie). Cette revalorisation participe ainsi à l'intégration de l'héritage minier dans une double politique culturelle et de sobriété énergétique pour la ville. De même, elle marque la transition vers des politiques de développement durable sur le temps long pour Heerlen.

Cette stratégie est enfin soutenue au niveau du territoire entier, grâce à l’organisation d’une communauté de communes autour d’Heerlen, Parkstad Limbourg. Créée en 1999, elle regroupe 8 municipalités et abrite 250 000 habitants. La communauté a élaboré une stratégie de résilience à partir de 2010 qui vise à créer une « Région durable et robuste » à l’Horizon 2040. Elle prévoit une organisation autour de deux piliers : le premier fondé sur une politique de diversification économique et le second sur une restructuration spatiale du territoire. Cette stratégie de long terme permet d’améliorer l’impact des politiques menées en harmonisant les pratiques et en mutualisant les compétences de toutes les parties prenantes présentes sur le territoire. Les politiques menées dans la municipalité illustrent de ce fait bien la volonté de la région de Limbourg de créer des dynamiques de changement fondées sur l'innovation et l'accroissement des capacités des acteurs locaux. L’orientation des politiques vers une gestion du territoire sur le long terme se retrouve également dans cette stratégie.

Conclusion

La Province de Limbourg constitue une région caractéristique des phénomènes de déprise en Europe : elle connaît depuis plusieurs années une double tendance de ralentissement économique et démographique, dont l’intensité varie entre les aires urbaines de la région. Face à ces mutations durables de la Province, des stratégies originales ont été mises en place, et soulignent l’importance de certains leviers dans l’établissement de processus de résilience au niveau régional et local :

- Le pilotage des stratégies à différentes échelles de décision et le soutien des dispositifs nationaux et régionaux aux stratégies locales ;

- L’harmonisation des stratégies à plusieurs échelles, avec des marqueurs communs : encouragement à l’innovation, à la recherche et au développement des technologies vertes, prise en compte du temps long ;

- Au niveau local, la nécessité d’impliquer les populations par un accroissement de leurs capabilités.

Dans l’ensemble, la stratégie mise en place dans la Province de Limbourg propose une vision intéressante du territoire et de ses problématiques, dans une logique systémique, favorable à l’efficacité des politiques menées.

Références

Fiche résumé réalisée par Adeline Bordais (CGDD-DRI) sous l’initiative et la relecture de Jean-Michel Tanguy (CGDD-DRI) et Anne Charreyron-Perchet (CGDD) ; à partir des travaux de la version complète de Lucile Dufour (CGDD). 13/10/2014.